LES 40 ANS DE LA MARCHE POUR L’EGALITE ET CONTRE LE RACISME Hommage d’Ernesto Novo à l’étape de la Marche à La Courneuve en décembre 1983
Fresque par Ernesto Novo avec l'artiste, photo Florimages
Fresque pour les 40 ans de la Marche pour l'égalité et contre le racisme, Ernesto Novo décembre 2023, photo Florimages
Le point de départ
Le contexte social est très tendu quand celles et ceux ayant participé à ce qui a été d’abord appelé « la Marche des Beurs » arrivent à Paris le 3 décembre 1983 pour sa manifestation. Deux semaines avant un jeune d’origine algérienne a été jeté hors du train entre Bordeaux et Vintimille par des légionnaires. A Strasbourg, l’étape s’achève par une marche à sa mémoire.
Partie de cité de La Cayolle dans les quartiers Nord de Marseille ; les marcheurs ont commencé un périple qui leur fait traverser « la France profonde » dans un message de paix et d’égalité et les amène à Grenoble, Chambéry, Dijon, Lille, Roubaix, Strasbourg… Paris.
La Marche est suscitée par un énième fait de société où un jeune français originaire du Maghreb est la cible d’un tir policier. Entre 1980 et 83, on dénombre en effet pas moins de quarante morts violentes de jeunes hommes issus de l’émigration ! Ce sont les enfants de la « deuxième génération » qui payent ce lourd tribut. Les filles ne connaissent pas le même sort. Elles en souffrent cependant au titre d’épouses, sœurs, mères et comme un chœur grec, elles se font la voix des morts.
En l’occurrence sans aucune raison de tirer, puisque le jeune homme s’interposait entre un enfant et un chien qui l’attaquait ! Toumi Djaïdja, c’est de lui qu’il s’agit décide alors, sur le modèle des marches pacifistes de Gandhi ou Martin Luther King, d’organiser un périple : tendre la main au pays, le rencontrer et obtenir son soutien pour l’égalité et contre le racisme.
Ils partirent 32 et arrivèrent 100 000 !
Dans toutes les villes traversées ces marcheurs impénitents pour l’égalité, sont dégoûtés d’être la cible de policiers, de gendarmes, de soldats, des skins des Halles… ou d’un simple habitant de cité comme à La Courneuve en juillet 83, qui prend son fusil pour tirer sur un enfant de neuf ans et le tue. Au motif qu’il « jetait des pétards ». Mais quels sont les acteurs de ces tragédies qui sont armés ? Amadou Gaye qui suit la Marche en tant que photographe en proposera de nombreux clichés, parmi ceux-ci, le suivant qui est explicite de l’agressivité ressentie par la deuxième génération. Vraisemblablement, peu de français voulaient réaliser qu’ils étaient là pour rester et acceptaient de leur faire une place dans la société.
La scène finale est à l’Elysée au soir du défilé parisien, François Mitterrand fidèle à sa promesse faite aux Minguettes quelques mois auparavant, reçoit huit représentants des « marcheurs » et annonce avec eux, à l’issue de la rencontre, la carte de séjour de dix ans.
L’intention du peintre
L'artiste Ernesto Novo, nous enrichit de la sensibilité de son partage ; de la teinte de sa vision personnelle, dans cette triangulaire où il nous inscrit avec ses modèles et lui-même. Il ne suit pas de chemin tout tracé, il crée le sien et laisse une trace. Et, ce faisant : il nous « re-trace ».
« Issu d’une famille d’origine vietnamienne de 11 enfants des quartiers Nord de Nice mon travail est axé sur le vivre ensemble, sur le fait de mettre en lumière les gens de l’ombre ».
« Le parti pris c’était de laisser une part du mur d’origine. Aussi, le choix a été fait de recouvrir partiellement le fronton du mur et de redessiner les photos d’archives de la marche de 1983 dans un style croquis en bichromie. J’ai laissé des espaces aérés avec sur les bords des contours de personnages. Je voulais peindre cette fresque comme une peinture sur toile à l’atelier mais sur 25 mètres de hauteur, garder cette liberté de geste. J’ai placé une foule dans le bas en bleu outremer plutôt que du noir et blanc trop « vintage « à mon goût, puis dans le centre j’ai continué en bichromie rouge et blanc. J’ai laissé circuler dans et autour de l’œuvre la couleur de fond beige clair. Sur la partie de gauche nous avons choisi avec la mairie et le Département une fleur d’oranger aux couleurs contrastées, rayonnantes et solaires, j’ai un faible pour le orange vif en arrière-plan. La fleur d’oranger symbolise : l’innocence, la pureté et la générosité. Et pour conclure j’ai fait circuler mes spirales colorées récurrentes ».
Fresque inaugurée le 2 décembre 2023 en présence de la municipalité de La Courneuve et des élus du Département, après 12 jours de travail avec mon assistant Tcheko, respect pour leur engagement. Remerciements : Malo le curateur pour l’Association « l’Ecluse », le maire de La Courneuve Mr Poux, Le Département de Seine-Saint-Denis, Mr Stéphane Troussel et le Collège Poincarré de La Courneuve, spéciale dédicace à Toumi Djaïdja.
@ernesto.novo ernesto.novo.parisain.painter
Sources : France Culture , Musée de l'Histoire de l'Immigration , Seine-Saint-Denis Actualités
Sigismond Cassidanius avec l’aimable concours de Marie Christian
Fresque par Ernesto Novo, photo Florimages
Fresque en cours par Ernesto Novo, photo Florimages
Taï-Luc n’est plus ! Une page de l’histoire du rock se tourne.
"Tai-Luc était devenu bouquiniste quai de Gesvres à Paris. Il ne connaîtra pas le démentiellement de sa boîte vert bouteille pour cause de JO pas si populaire que ça. Le chanteur de La Souris Déglinguée s’est éteint début décembre 2023.
Tai-Luc, quai de Gesvres en mai 2020.- Photo REMY ARTIGES
Il avait créé le groupe punk pour porter la bonne parole à la jeunesse enragée (raya). Un discours tourné vers le Vietnam et la banlieue (aux accents rock, rap et dub. Véritable passerelle entre les genres musicaux, il n’était pas rare de rencontrer des groupes de Rap comme NTM à leur première partie. Le discours vindicatif de La Souris Déglinguée n’est en effet pas très éloigné du flow des rappeurs des cités. En revanche, leur parcours intransigeant et radical les place résolument du côté obscur des punks et des skins : salles dévastées, interdiction de concert à Paris, nombreuses maisons de disque dont l’étrange Kuklos pour le deuxième album, le label de… Daniel Guichard !
En 1994, c’est la rupture avec le départ de Jean-Claude Dubois et de Jean-Pierre Mijouin puis une certaine incursion dans la world music avec l’album “Banzaï” puis en 1995 l’atypique “Tambour et soleil” qui réussit pour la première fois à placer des chansons sur les ondes d’RTL et autres NRJ. Ce qui n’empêche pas au groupe de conserver le respect dû à son intégrité et de continuer sa route en marge des Top 50.
Tai-Luc n’est plus et une page de l’histoire du rock se tourne. Celle des années punk qui perdent un de leur hérault, pour ne pas dire héros" Voir moins
Commentaires Sigismond CassidaniusRIP
Oak-Oak
Oh que.. ah okay ! Il ne faudrait pas reconnaître dans le nom de l'artiste celui d'un chêne en anglais et il ne faudrait pas prononcer Hôk-Hôk mais Wak-Wak...
Bien qu'en un sens sa veine est creusée dans le meilleur bois duquel l'art urbain réchauffe ses vieux os : le droit à la ville.
La réappropriation de l'espace urbain, l'auteur la pratique depuis les épidermes de la cité, comme un tatoueur qui pique ses touches... Ici c'est une fillette qui semble être funambule sur la chaîne qui passe devant le mur. Ou là un mini Bruce Lee qui semble avoir défoncé la rambarde de protection des piétons qui ploie sous le coup ! Ces signes, l'artiste les dispose pour constituer une saynète. Et le comique est au rendez-vous de ce carrefour, puisque c'est un mot d'esprit graphique, un calembour visuel.
Semer la ville de signes rieurs, c'est la tâche que semble s'être assigné le "Johnny Appleseed" de l'art de la rue, pour lui redonner du sens. Si la poutre sur laquelle s'appuie Oak-Oak est solide, c'est sans doute parce que son humour soutient l'effet de surprise que le décalage a suscité, quand la graine a germée. Chaque fois que nous voyons une pousse signée Oak-Oak.
Mais Oak-Oak pour moi signifiera toujours quoi-quoi en bon verlan des familles. Quoi-Quoi !? Le surgissent d'une pensée singulièrement décalée. Oh c'est simple mais il fallait y penser... woké woké !
Matt-tieu
Il trace un parcours singulier dans la ville, fait d’arrêtes et d’angles doux.
Son empreinte est celle du pas suspendu de l’autruche. Il filme dans cet ordinaire, l’incongruité de nos postures de posters. Comment s’afficher sinon en étant soi-même ? Comment donner sans sincérité ? Matt_tieu a trouvé la réponse dans le trait à la craie, sur les plus beaux murs que la ville ait à offrir. Il dessine la caricature des attitudes calquées sur le consumérisme, le goût du tout tout-de-suite, le caprice computériste de l’instantanéité, pour mieux les caricaturer.
Pour cela il a choisi l’animal qui l’ « émeu » le plus, ce parangon de l’oiseau qui ne sait pas voler, comme un symbole du tiraillement entre passion et raison, nature et culture, idéal et réalité. Mais c’est une caricature riante sur laquelle l’artiste nous porte sur son aile et l’atterrissage est le plus souvent un sourire.
Si son chat pêche une arête de poisson, c’est dire en dessin, la fuite délirante où cours notre monde qui se nourrit de phosphates et de métaux lourds en tous genres, qui brûle douze calories pour en produire deux à bout de souffle. En fait, ses bipèdes d’oiseaux inachevés retracent tellement la destinée humaine qu’ils jouent à plein la valeur catharsistique du théâtre, ce lieu public, où chacun peut se reconnaître et participer en tant que citoyen à une destinée commune.
Prenant le contre-pied du présupposé baudelairien selon lequel le créateur est handicapé par « ses ailes de géant [qui] l’empêchent de marcher », Matt_tieu saisit l’opportunité de marquer d’un trait blanc les contradictions qui nous empêtrent et l’ironie mordante et nécessaire de l’expression artistique.
Son squelette de baleine entourée de bouteilles en matière plastique est à ce titre éloquent.
Matt_tieu prend son temps, et par là, il nous le rend aussi. Son travail est à l’instar de la patine que lui confère les éléments, la pluie, le soleil, le vent et cette teinte particulière que prend la craie ternie mais toujours lisible, car elle creuse, griffe autant qu’elle trace. Matt_tieu en joue, dans la matrice aussi, qu’est-ce donc qu’un squelette n’était la préfiguration de notre condition mortelle ? Le temps, comme l’espace, sont courbes, non, c’est peut-être pourquoi l’artiste tend des élastiques à la manière d’un voyant, pour nous rattacher à ce qui nous relie.
La beauté moderne sera temporaire et vécue, selon Guy Debord, Matt_tieu nous en dresse le tableau…
*crédit photo de l'auteur, Matt-tieu fév.2019, Le Mur des Trois-Couronnes, Paris 11ème
Raphaël Federici
Prendre la vague à l'âme, dompter l'une pour domestiquer l'autre. C'est le rôle des marins.
Cependant pourquoi s'engager dans la marine quand on peut être pirate ? C'est, d'un coup de cuillère à pot, la question que Raphaël Federici a tranchée en se faisant pirate qui vogue sur les murs gondolés de nos villes.
Le peintre écume les rues de sa silhouette un peu Jean-Paul Gauthier, un peu Hugo Pratt, d'un aventurier au long cours, un gentilhomme d'aventure à l'instar de son créateur. Il flotte, par delà le lac de l'intranquillité ou sur les crêtes de l'océan de nos constantes inconstances. Il est comme le pavillon qui marque la dérive lente des sentiments, le navire-amiral des rêves inachevés qui ne demandent qu'à prendre un nouveau départ.
Sa belle sirène sait aussi nous bercer de ce rythme apaisant du roulis sur ses jambes de poisson et je sens dans cette berceuse toute la tendresse que l'artiste puise dans son enfance, comme les pêcheurs puisent les coquillages au plus profond des abysses.
La marinade attendrit même les vieilles carnes, c'est bien connu des restaurateurs, mais le plat épicé des saveurs d'ailleurs que nous propose le Chef n'est pas réchauffé lui. Il raconte une histoire, il m'emporte. De l'eau à la bouche, à la pompe de notre insatiable besoin d'aimer, Raphaël Federici commet l'exploit chaque fois que je le croise au large, de me remettre la barre sur mes horizons véritables et de finalement me rendre la vague à l'âme.
Octobre 2019 pour l'exposition de l'artiste au Lavo//matik.
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