La montée en puissance des approches de développement local résulte
d'une série de constats qui concourent à valider des mouvements d'idées
et parfois des expériences menées depuis plusieurs décennies.
Au cours des années quatre-vingt, les stratégies de développement
menées sous l'égide des Etats manifestent leurs limites. La
concentration des pouvoirs économiques, culturels, techniques dans leurs
mains ne permet plus d'assurer la cohérence nécessaire pour soutenir
les processus de développement. Dans les pays du Sud, les efforts des
ONG mais aussi de très nombreux autres opérateurs comme les sociétés de
développement pour "organiser les populations" ont conduit à
l'apparition d'organisations réellement représentatives qui acquièrent
des capacités de négociation avec le pouvoir central. En France, comme
dans de nombreux pays d'Europe, l'effritement, certains diront
l'effondrement des corps intermédiaires d'envergure nationale
(syndicats, grandes organisations d'éducation populaire, organisations
et mouvements confessionnels...), ouvre un espace aux organisations de
proximité.
Par ailleurs l'émergence des questions d'environnement porte à un
niveau politique des débats antérieurement limités aux techniciens (sur
la production d'énergie ou l'industrialisation de l'agriculture par
exemple...). "Penser global, agir local" rend compte de la demande des
acteurs locaux d'être partie prenante aux décisions qui les concernent.
Plus généralement, responsables politiques et opérateurs de
développement sont de plus en plus convaincus qu'il n'y a pas de
développement possible sans prise en compte des références sociales et
culturelles des populations concernées. Chaque région, chaque terroir
même, a des traits qui lui sont spécifiques dont il faut tenir compte
dans l'élaboration des processus de développement et plus encore dans
leur conduite. Il s'agit dès lors de revitaliser des formes de
solidarités locales face aux contraintes imposées par les mécanismes
économiques (prix des matières premières, logique techniciste du
développement…) et par les instances politiques nationales (parti
unique, remontées de toutes les décisions au niveau central…). L'action
locale apparaît d'autant plus indispensable que les efforts demandés aux
populations pour assurer le développement leur apparaissent sans
résultat sur leur niveau de consommation et sur leurs conditions de vie.