Le premier mur que j’ai vu, aimé et dont je me souviens, c’est le mur de Berlin. Au commencement était le graffiti. Au commencement était la dénonciation du totalitarisme et appuyée sur un ressort paradoxal mais néanmoins convaincant, la critique du consumérisme, cet autre totalitarisme plus sournois qu'est le capital. Je dirai aussi larvaire, par sa capacité à réduire les catégories de pensée, les champs de son exercice, enfin le vocabulaire indispensable à l'étayer. Mais les deux se rejoignent, n'est-ce pas Goebbels, qui se targuait de ne donner à penser au peuple allemand avec seulement 5 000 mots..?
Au commencement était la parole libre. Les fondations de l’art du Street-Art reposent sur ces bases du besoin impérieux d’expression. Graffiti provient d’un mot latin, qui signifie : stylet, qui s’appareille aux murs, les graffiti de Pompéi par exemple.
Même si l’art de la rue n’a pas gardé toute la tradition, dans cet espace, il tient une parole. Il n’en demeure pas moins un lieu entre la parole sacrée et la vox populi. L’art du Street-Art est de les savoir résumer en une savante formule, par exemple la triade Mosko, Mesnager, Nemo ou une Miss-Tic, pionnière titulaire dont le commentaire poétique sublime le trait.
Au commencement était cette nécessité de langage, là où le discours était interrompu.
Les interventions et (re)marques plastiques sur nos murs contemporains ne sont que l’écho d’une pratique ancestrale, depuis l’art pariétal, d’il y a quelques milliers d’années, jusqu’à la jungle des villes, Ender et le domaine des anges, Codex Urbanus et son bestiaire autant imaginaire que savant, Jef Aérosol et ses idoles Rock ou Blek-le-Rat et ses portraits à vif. Il n'y a pas d'angélisme dans la pratique d'un art, pas d'eugénisme mais un engagement de tous les jours pour ces artistes, que je salue ici, sans eux les murs de nos villes demeureraient des écrans blancs, sans pouvoir rien y projeté de voyage imaginaire.
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